Consommer Durable

Avis d’expert sur la pollution de l’air intérieur

Une nouvelle étape vers la transparence envers les consommateurs concerne la pollution de l’air intérieur en la création d’un affichage environnemental sur les produits de décoration, d’ameublement et de construction de l’habitat. Peintures, papiers peints, vernis, colles, tapis sont désormais classés de A à C selon le potentiel d’émissions de polluants organiques volatils.

Aujourd’hui, j’ai eu l’occasion d’interviewer le professeur Damien Cuny, toxicologue spécialisé dans la pollution de l’air intérieur, exerçant au sein de l’université des sciences biologiques et pharmaceutiques de Lille. Nous avons ensemble dressé l’état des lieux des moyens en matière de lutte contre la pollution intérieure, puis des bonnes pratiques à mettre en place pour limiter les risques.

Damien Cuny, toxicologue spécialisé en pollution de l'air intérieur, me reçoit dans son service à l'université de Lille 2

De multiples sources de pollution à la maison ou au bureau :

L’air intérieur est plus pollué que l’air extérieur, pour l’évidente raison qu’il est moins fréquemment renouvelé. Aujourd’hui, la pollution par les ondes (wi-fi, portable…) vient s’ajouter à une longue liste de sources de pollution comme celles émanant des produits d’entretien (aux flacons jamais totalement étanches), des traitements (exemple de l’anti-puce pour les animaux), mais aussi les meubles (vernis), moquettes, tapis et parquets qui libèrent des substances toxiques… Sans oublier les désodorisants, bougies parfumées, encens, mais aussi les insecticides, la poussière et bien entendu, la cigarette.

Le syndrome des bâtiments malsains :

Apparu dans les années 80, il regroupe un ensemble de signes annonciateurs d’une réaction à la pollution de l’air intérieur d’un logement/lieu de travail ou autre espace fermé. Cette succession de signaux avant intoxication ou allergie est : nausée, maux de tête, réaction allergique.

Une ordonnance pour un diagnostic de la pollution interne de votre habitation :

La prescription médicale de votre médecin ayant décelé des indices de début d’allergie ou de réaction physique à un habitat pollué peut vous permettre d’accéder à un diagnostic par un CMEI (Conseiller Médical de l’Environnement Intérieur) de votre domicile en termes de pollution de l’air intérieur. Bon à savoir. Certaines associations peuvent aussi vous conseiller, et établir le bilan de votre logement.

Des outils pour lutter contre la pollution de l’air intérieur :

Attention : laisser l’habitat s’aérer !

Le professeur Cuny met en garde contre un possible retour aux actions engagées dans les années 70. En contexte de crise à l’époque, comme aujourd’hui, il fut tentant, pour des raison d’économie d’énergie, de se calfeutrer chez soi. L’habitat devint un lieu finalement dangereusement étanche, baignant ses occupants dans les vapeurs toxiques insidieuses…

Trois conseils primordiaux pour prévenir la pollution intérieure :

  1. Etre vigilant, en ayant une utilisation rationnelle des produits polluants (d’entretien, mais aussi des bougies parfumées par exemple), pour ainsi éviter de polluer
  2. Aérer régulièrement, voire faire poser une aération
  3. Pour les fumeurs, fumer dehors !

Le tabac, super-pollueur, on en viendra tous à bout :

Il y a eu de gros progrès sur le combat contre le tabac depuis quelques années. Il est primordial de fumer dehors ou à la fenêtre, car les composés polluants de la cigarette peuvent se fixer sur les textiles et continuer de se propager par la suite, notamment chaleur aidant. Pourquoi ne pas se mettre à la cigarette électronique ou arrêter complètement ?

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La suite p.2> vrais et faux amis de la lutte contre la pollution intérieure : plantes dépolluantes et filtres !

Vrais et faux amis de la lutte contre la pollution d’intérieur :

Les plantes dépolluantes sont peu ou pas efficaces pour lutter contre la pollution intérieure. Elles ont été testées dans des conditions cohérentes, avec des doses réalistes de polluants… Mais ce ne sont pas leurs propriétés qui sont mises en cause par la recherche, mais plutôt la proposition de vente faite au public. Car il faudrait non pas deux ou trois plantes mais plutôt une centaine, pour dépolluer efficacement un intérieur… Intrinsèquement, les plantes, toutes, ont une propriété d’accumulation, mais pas de rendement suffisant à moins de troquer le living pour une canopée

… Ou un jardin filtrant. Ces procédés connaissent un développement important en milieu urbain. Vous pourrez en voir des exemples ici, ou . Un parking de la gare de Lyon Perrache arbore depuis peu un mur végétal filtrant de plusieurs dizaines de mètres…

Ce type d'installation dépolluantes connait un succès grandissant, ici à Marseille (2010).

Il existe également pour les espaces « réduits » (pour la maison donc) des assainisseurs d’air, ou installations dépolluantes, tels que des purificateurs d’air. Il s’agit de systèmes actifs basés sur la biofiltration. Le professeur Cuny précise que ces machines peuvent agir bénéfiquement sur la pollution de l’air intérieur d’un espace fermé (mais aéré régulièrement), mais qu’elles n’ont pas la référence d’un laboratoire les ayant testées correctement, ou alors, il y a un manque de sources à ce sujet. Si jamais tests il y a eu, ils n’ont pas été normalisés, c’est à dire que la manière de procéder lors d’un test sur un appareil de ce type n’est pas homogénéisée entre différents labos. Il devient alors difficile d’établir un comparatif des performances entre les différents appareils de la gamme.

Le mot de la fin sur l’avenir et les chantiers en cours ?

Le professeur administre le mot de la fin.  » Un effort important est à faire sur la recherche et l’ingénierie sur les systèmes actifs filtrant, car aucun appareil universel ne pourra exister ». Il reste également pour le futur proche à lancer les chantiers des perturbateurs endocriniens (du système hormonal donc) tels que les phtalates (utilisés pour la souplesse des plastiques le plus souvent, donc très courants, pour ne pas dire familiers) et les retardateurs de flamme (intégrés dans les anti-propagateurs d’incendie).

Au sujet d’une autre source de perturbation endocrinienne, l‘article sur la pollution des eaux courantes.

Merci au professeur Damien Cuny pour son accueil et ses lumières.

 

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Accéder à la fiche pratique : [question_qualif hash= »6a58ced75dff69fb4e50383f06063393″]

 

 

En savoir + sur la pollution :