Consommer Durable

Pourquoi Auchan continue à distribuer des sacs en plastique pour les fruits et légumes

Le directeur du service environnement d’Auchan a été très réactif et m’a contacté pour répondre à mes interrogations concernant la mise à disposition des sacs en plastique transparent au rayon fruits et légumes de son enseigne.

Je me demandais en effet pourquoi les enseignes mettant depuis quelques années à disposition des clients des cabas réutilisables et ayant stoppé la distribution de sacs de caisse en plastique continuaient néanmoins à distribuer des sacs en plastique transparents aux rayons fruits et légumes…

L’image du cabas arborant une publicité pour la protection de l’environnement sponsorisé mais plein de sacs en plastique me semblait particulièrement paradoxale… éclaircissements :

Plastique, cartons, cabas, législation, hygiène, responsabilité et action du consommateur :

N’y a t-il pas d’alternatives plus écologiques à mettre en place pour remplacer ces sacs en plastique sachant que votre enseigne promeut l’utilisation de cabas réutilisables et de sacs en plastique payant, mais recyclés et recyclables en caisse, justement pour lutter contre la prolifération du plastique dans la nature ?

Réponse de Monsieur Pierre Frisch, directeur environnement d’Auchan.

« Tout d’abord, ces sacs sont recyclables. Il convient de les mettre dans le bac de tri afin de les traiter de la façon la plus écologique possible en fin de vie. Ils sont censés être incinérés par les centres de tri des municipalités afin d’être recyclés. Il en va cependant de la responsabilité du consommateur ainsi que de celle de la commune, d’assurer le bon traitement de ce déchet.

La législation oblige les enseignes à mettre à la disposition de leurs clients des contenants pour ce type de produit (fruits et légumes). Si Auchan a opté pour les sacs en plastique transparent, c’est parce qu’ils arrivent en tête de notre classement suite à l’ACV (analyse du cycle de vie) permettant de juger le bilan écologique (et économique) du produit, de l’extraction de la matière première à la fin de vie du produit fini. Les enseignes doivent répondre également à des normes d’hygiène très strictes qui les empêchent d’inciter directement le consommateur à réutiliser un sac à cet usage. »

Les enseignes doivent proposer des emballages hygiéniques pour les fruits et légumes, mais le consommateur n'est pas obligé d'en faire usage ! (Photo : le Figaro)

Pourquoi ne pas utiliser de sacs en papier ?

« Le problème principal réside dans la fabrication de la pâte à papier, qui est très énergivore, notamment par ses besoins en eau. En comparant les ACV du sac en papier et du sac en plastique transparent, le bilan du second apparaît comme étant le plus satisfaisant en terme de coût et de bilan environnemental. »

Note : Des associations de consommateurs, telles que l’UFC Que Choisir ne soutenaient déjà pas, en 2003 cette proposition d’alternative, arguant une dépense d’énergie trop élevée non seulement lors du processus de production de ces sacs, mais également lors de leur recyclage.

Pourquoi pas de sacs en plastique biodégradable ?

« Il faut savoir qu’un sac en plastique biodégradable ne l’est véritablement que lorsque les conditions naturelles optimales sont rassemblées, ce qui n’a rien d’évident… C’est aussi une question de coût : 4 à 6 fois plus cher. De plus, la majorité des communes n’est pas équipée pour traiter d’une part le plastique non biodégradable et d’autre part, le plastique biodégradable. »

Note : En 2003, l’UFC Que Choisir ne soutenait pas non plus l’alternative des sacs en plastique biodégradable. Les arguments étaient les mêmes que ceux du directeur Environnement d’Auchan, auxquels s’ajoutaient deux autres :

Le consommateur peut-il alors se présenter avec ses propres emballages réutilisés ? Ou se passer purement et simplement des sacs en plastique transparents ?

« Oui, le consommateur est tout à fait libre de ne pas prendre un sac plastique pour emballer une pomme par exemple. Il peut très bien venir dans le magasin, muni de ses propres emballages, ou encore apposer directement l’étiquetage à même le produit, et choisir de délaisser le sac en plastique transparent disponible à la pesée. Cela dit, un client venant acheter des quantités plus importantes de fruits et légumes trouvera surement les sacs en plastiques mis à disposition très pratique, pour la pesée justement, les balances étant préalablement tarées au poids de ces emballages… »

Conclusion :

La situation est compliquée au sujet des emballages dans les enseignes commerciales alimentaires. A nous d’agir individuellement, en limitant clairement notre stock potentiel de sacs en plastique, en évitant le plus souvent possible d’en disposer, en refusant ceux que l’on nous propose au marché ou ailleurs. Ce n’est pas toujours pratique de faire sans mais n’est ce pas simplement une vielle manie à laquelle il vaudrait mieux faire aujourd’hui nos adieux, de manière générale pour l’ensemble des emballages ?

Au rayon fruits et légumes des moyennes et grandes surfaces, il est de mise de ne plus se servir de ces sacs en plastique transparents. Venez avec vos emballages réutilisés, ou alors collez directement l’étiquette de la pesée sur vos produits si vous n’en avez pas trop. Parce que la vie, la vrai, c’est celle que l’on mène en faisant des choix qui comptent !

Suite page 2 : vers une nouvelle taxe sur les sacs en plastique transparents et une augmentation des produits ? Un député s’avance sur ce sujet >>>


Épilogue : une taxe pour les sacs transparents des rayons fruits et légumes  à venir ?

Novembre 2011, la commission des finances de l’Assemblée adopte un amendement visant a taxer les sacs en plastique des rayons fruits et légumes à partir de janvier 2014 pour les raisons de protection de l’environnement que l’on connait.

L’argument du député à l’initiative laisse une impression mitigée : « faire basculer tout le monde vers les sacs en plastique biodégradables, qui coûtent certes plus cher, mais qui au moins quand on les abandonne, se dégradent assez rapidement en quelques mois« . (source Europe 1). Mais, un sac en plastique, ça ne « s’abandonne » pas, Monsieur le député… de plus, ça ne se dégrade pas si facilement que ça, surtout en milieu urbain ou en mer… c’est assez gênant d’entendre un responsable politique (je ne juge pas la proposition mais l’usage particulier de cette formulation) s’exprimer avec autant de légèreté sur un sujet si lourd en conséquence… Et cela fait écho à l’argument avancé par l’UFC Que Choisir, citée plus haut dans l’article, menaçant d’une dédramatisation du geste pollueur.

Du côté des détaillants, on s’indignait à l’écoute de cette annonce pouvant augmenter le prix du sac par quatre. Les détaillants pourraient face à une telle mesure, répercuter le coût supplémentaire sur le prix des produits, à hauteur de 5%.

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